C’est une parole rare dans le monde de la justice. Une magistrate menacée de mort par un prévenu a témoigné à visage caché dans un reportage du 20H de TF1. Une prise de parole sous haute tension, conditionnée par l’anonymat, tant les risques sont grands.
Une pression quotidienne qui met aussi en danger les proches
“Quand on rentre dans la magistrature, on sait que ça va être difficile”, explique-t-elle. “Mais on ne s’attend pas à ce que cela nous expose physiquement, et surtout, que cela puisse mettre en danger nos proches.”
La menace est telle qu’elle a été placée sous protection policière pendant plusieurs mois. “Un jour, j’ai reçu un appel du service de protection. Une des questions qui m’a marquée, c’était de me demander mon groupe sanguin, au cas où il faudrait m’évacuer après une attaque par balle. C’est à ce moment-là qu’on réalise qu’on n’a plus de vie privée. On est accompagné en permanence par des policiers”, raconte-t-elle.
150 magistrats menacés, une quinzaine sous protection
Si autrefois ces pressions étaient surtout l’œuvre de réseaux criminels organisés, comme la DZ Mafia, elles se généralisent désormais à tous types d’affaires, du simple différend familial aux dossiers de criminalité plus lourds. Selon le ministère de la Justice, 150 magistrats sont aujourd’hui menacés, et une quinzaine d’entre eux bénéficient d’une protection policière renforcée.
“Il y a la menace du quotidien, avec le justiciable lambda qui, sous le coup de la colère, peut vous jeter un livre, un stylo, voire une chaise”, détaille Ludovic Friat, président de l’Union syndicale des magistrats. “Mais il y a aussi ce qui se passe en ligne, où l’on voit que la menace grossit, et que certains ont intérêt à mettre une cible dans le dos des magistrats.”
Un dispositif d’alerte encore à prouver
Face à cette montée de la violence, le ministère de la Justice a mis en place en juillet dernier une cellule spécialisée pour détecter et réagir plus rapidement aux menaces. Son efficacité reste toutefois à démontrer.
Aujourd’hui, seuls les magistrats du parquet national antiterroriste bénéficient d’une protection systématique. Mais pour de nombreux juges et procureurs confrontés quotidiennement à des situations à risque, le sentiment d’abandon reste fort.