L’affaire des nourrissons décédés dans le service de néonatologie de l’hôpital de la Rabta à Tunis continue de hanter l’opinion publique, plus de cinq ans après le drame qui a coûté la vie à 14 nouveau-nés en mars 2019. Ce scandale met crûment en lumière les dysfonctionnements du système de santé en Tunisie et soulève des questions profondes sur la responsabilité, la négligence et la culture de l’impunité.
Dans un nouveau rebondissement judiciaire, la Cour d’appel a confirmé le jugement de première instance condamnant trois responsables — la directrice du Centre de maternité et de néonatologie, le directeur de la maintenance et le chef du service de pharmacie — à huit mois de prison pour chacun des quinze cas examinés. Ces condamnations ont été prononcées pour homicide involontaire résultant de la négligence et du manquement au devoir professionnel, après que les enquêtes ont révélé qu’une bactérie s’était infiltrée dans les poches de nutrition préparées à l’hôpital.
Mais le dossier est loin d’être clos : quatorze autres affaires restent encore en cours d’instruction. Si les charges retenues contre les accusés sont confirmées dans ces dossiers restants, ils pourraient encourir jusqu’à dix ans de prison.
Ce qui rend cette affaire d’autant plus tragique, ce n’est pas seulement le nombre de victimes ou la douleur immense laissée aux familles endeuillées, mais le fait qu’une simple négligence administrative ou médicale ait pu être fatale. Perdre un nourrisson à cause d’un défaut d’hygiène ou d’un manque de rigueur dans la préparation d’un produit médical est tout simplement inacceptable.
L’indemnisation de 30 000 dinars tunisiens accordée à chaque famille représente certes une forme de reconnaissance du préjudice subi, mais reste largement symbolique face à l’irréparable. Car la véritable justice, dans ce genre de drame, ne se limite pas aux peines prononcées : elle implique surtout des réformes structurelles capables de garantir que pareille tragédie ne se reproduise jamais.
L’affaire des bébés morts à l’hôpital de la Rabta n’est pas un fait divers ordinaire. Elle est le miroir d’une crise profonde du système de santé tunisien, un rappel brutal que des vies innocentes peuvent être perdues par pure négligence. Il est temps que la culture de la responsabilité remplace celle de l’indifférence. Avant que d’autres innocents n’en paient le prix