Tunis, le 11 avril 2025 — Une nouvelle étape vient d’être franchie dans l’affaire visant l’avocate et chroniqueuse Sonia Dahmani. La chambre d’accusation de la Cour d’appel de Tunis a décidé de renvoyer l’affaire devant la chambre criminelle du tribunal de première instance, dans le cadre du décret-loi 54, à la suite d’une plainte déposée par la Direction générale des prisons et de la rééducation. Ce revirement judiciaire survient après que la Cour de cassation ait cassé une première décision de renvoi, ordonnant un réexamen du dossier par une autre composition de la chambre d’accusation.
Ce feuilleton judiciaire, à la croisée du droit et de la liberté d’expression, illustre la dérive inquiétante à laquelle est confrontée la parole libre en Tunisie. Le motif de la poursuite ? Une déclaration de Sonia Dahmani sur les conditions de détention dans les prisons tunisiennes. Une opinion exprimée dans le cadre du débat public, sur un sujet ô combien sensible et crucial dans toute démocratie digne de ce nom.
Ce que l’on reproche à Sonia Dahmani, ce n’est pas un crime. C’est d’avoir parlé. D’avoir utilisé sa voix, sa plume, et sa liberté de pensée pour dénoncer ce qu’elle estime être une réalité préoccupante. En cela, elle a exercé non seulement un droit fondamental, mais aussi un devoir civique.
Le recours au décret-loi 54 dans cette affaire constitue une arme de dissuasion contre les voix critiques. Un texte censé lutter contre les fausses informations, mais dont l’interprétation abusive menace aujourd’hui la liberté d’opinion. Faut-il rappeler que la critique des institutions publiques — y compris celle du système carcéral — est non seulement légitime, mais essentielle au bon fonctionnement d’un État de droit ? La démocratie ne se construit pas sur le silence, mais sur la confrontation des idées et la transparence.
Sonia Dahmani n’est pas seule. Derrière elle, se dresse une société civile éveillée, des confrères du barreau, des journalistes, des citoyens engagés. Car ce procès n’est pas seulement le sien. Il est celui de tous ceux qui refusent de voir la Tunisie sombrer dans une logique de peur et de bâillonnement.
Nous exprimons ici notre plein soutien à Sonia Dahmani et appelons à la fin des poursuites à son encontre. Défendre ses droits, c’est défendre les nôtres.