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Tunisie :des déchets textiles importés illégalement sous couvert de vêtements usagés

  • Photo du rédacteur: Amira AZIZI
    Amira AZIZI
  • 4 déc.
  • 2 min de lecture
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Un mois après les révélations de la chaîne italienne RAI 3 sur un trafic de déchets textiles entre l’Italie et la Tunisie, les autorités tunisiennes restent silencieuses. Une enquête journalistique révèle les mécanismes de fraude, les risques sanitaires, et les complicités politiques derrière ce scandale environnemental.


Des “vêtements usagés” qui n’en sont pas


Le 3 novembre 2025, l’émission d’investigation Report diffusée sur la chaîne publique italienne RAI 3 a mis au jour un trafic massif de déchets textiles exportés illégalement vers la Tunisie. Présentés comme des “vêtements usagés”, ces cargaisons contiennent en réalité des textiles souillés, non triés, parfois contaminés, impropres à la réutilisation ou au recyclage.


Les journalistes italiens ont documenté :

- Des documents douaniers falsifiés,

- Des témoignages d’anciens employés de centres de tri,

- Des images de conteneurs remplis de déchets textiles destinés à l’enfouissement.


12 000 tonnes de déchets en deux ans


Selon les estimations croisées de l’ONG Watchdog et des douanes italiennes, plus de 12 000 tonnes de textiles ont été expédiées vers la Tunisie entre janvier 2024 et octobre 2025. Près de 80 % de ces cargaisons ne répondraient pas aux critères de réutilisation définis par les conventions internationales.


La Tunisie est ainsi devenue le deuxième pays de destination des déchets textiles italiens, après la Roumanie.


Italie : justice en marche. Tunisie : silence radio


En Italie, le parquet de Naples a ouvert une enquête dès le 6 novembre. Deux commissions parlementaires ont été saisies. En Tunisie, aucune procédure judiciaire n’a été engagée à ce jour. Le ministère de l’Environnement, les Douanes et le ministère public n’ont publié aucun communiqué.


Ce contraste rappelle l’affaire des déchets italiens de 2020, où 282 conteneurs de déchets ménagers avaient été illégalement importés à Sousse. À l’époque, plusieurs hauts responsables avaient été arrêtés, dont Mustapha Aroui, ministre de l’Environnement, condamné à 3 ans de prison avant d’être libéré après le 25 juillet 2021.


Risques sanitaires et environnementaux majeurs


Les déchets textiles non recyclables présentent des dangers graves :

- Contamination des sols par des métaux lourds et microplastiques,

- Risques sanitaires liés aux moisissures, bactéries et produits chimiques,

- Décharges sauvages menaçant les nappes phréatiques.


Une étude de l’Institut National de Santé Publique (2023) indique que les zones proches des décharges textiles présentent un taux de maladies respiratoires 30 % plus élevé que la moyenne nationale.


Des sociétés-écrans et des complicités politiques


L’enquête de RAI 3 cite plusieurs sociétés-écrans basées à Sfax et Tunis, soupçonnées d’avoir servi d’intermédiaires pour ces importations. Des sources anonymes évoquent des liens avec des figures proches du pouvoir exécutif. Des magistrats tunisiens dénoncent, sous couvert d’anonymat, un climat de peur et des pressions politiques visant à enterrer l’affaire.


Une souveraineté environnementale en question


Ce scandale soulève une question fondamentale : la Tunisie est-elle en train de redevenir une zone de sacrifice environnemental au profit d’intérêts privés et de complicités politiques ? L’absence de réaction officielle, malgré les preuves accablantes, interroge sur l’état de droit, la transparence institutionnelle et la capacité de l’État à protéger ses citoyens.


AMIRA AZIZI

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